le Joker en train de fouiller les poubelles pour illustrer les enjeux IA

L’IA et l’inévitable plein pouvoir de l’intention

Novembre 2025

Pour accomplir toute sortes de tâches ou bien assouvir une fantaisie, l’IA est là. Disponible, abondant, prêt à être cueilli.

Nous l’utilisons bien souvent comme une carte Joker : un moyen fabuleux de faire le « sale boulot » quand l’énergie vient à manquer. À la différence qu’un jeu de carte ne contient pas plus de trois Joker. Sa rareté nous force à le sortir pour les grandes occasions. Son usage doit être raisonné. C’est systémique. Mais dans notre cas, l’IA murmure à notre oreille : « utilise-moi à l’infini, que je t’épargne ces vilains efforts ».

N’est-ce pas humain d’y céder ?

Il existe une autre différence. Dans un jeu de carte, le Joker constitue un avantage concurrentiel évident : si vous en avez un dans votre jeu, cela implique que d’autres en sont dépourvu. Mais au jeu du nouveau monde du travail, chaque main en regorge. Nous disposons tous d’un incroyable pouvoir d’action. Capacité à accomplir est d’ailleurs totalement décorrélée du niveau d’implication de son initiateur, et du temps qu’il y consacre.

Alors que se passe-t-il quand nous sommes tous à « une phrase et deux clics » de tout faire ?

Et bien curieusement, pas grand chose.

Du moins c’est ce que j’observe à mon échelle. Les LLM sont très largement utilisés par tous, mais rien ne semble changer. Je n’observe ni bond, ni progrès, ni amélioration notable. Dans aucun domaine. Rien. Les modes opératoires ont changés, mais pas les effets. Ou peut-être que, si je devais en trouver un, il serait plutôt négatif. Les emails que je reçois sont globalement plus longs, plus creux, parfois même dépouillés de tout sens. Du blablabla qui sort son meilleur costume, son plus beau make-up.

Faisons les maths : Pouvoir d’action illimité + Instantanéité d’execution = rien de spécial, voir moins bien qu’avant.

Comment l’expliquer ?

Et bien, que reste-t-il pour faire la différence quand tout le monde peut tout faire ?
Nous sommes contraints de remonter d’un cran pour s’extraire du « faire » et remonter à sa cause : l’intention.

C’est l’intention qui donne une substance au résultat final. C’est elle qui initie l’action, qui donne la direction. C’est elle qui nous encourage à se satisfaire du premier résultat, ou tout au contraire qui nous pousse à poursuivre notre cheminement jusqu’à un résultat à la hauteur de notre ambition.
L’intention est le curseur de l’accomplissement. Elle seule est aujourd’hui responsable de la qualité de ce qui est produit.

À l’heure du travail assisté par l’IA, on ne juge plus un travail parce qu’il est « fait », mais plus que jamais par sa justesse, sa pertinence, sa qualité. Toute réalisation est aujourd’hui trahie par l’intention de son créateur. Elle est plus que jamais VISIBLE. Un email à rallonge qui passe à côté du sujet revient strictement à hurler « J’EN AI ABSOLUMENT RIEN À FOUTRE DE TOUT ÇA ». Et c’est nouveau.

Avant, on pouvait au moins respecter le geste d’avoir essayé, d’avoir fait quelque chose. Maintenant, un tel niveau de livrable est une insulte cynique envers son destinataire.

Et cela se ressent comme tel.

À l’inverse, l’IA permet à toute personne bien intentionnée d’atteindre des niveaux de qualités sans précédents. Nous y reviendrons généreusement dans les prochaines newsletters !

Je pense qu’une fracture inconciliable s’est produite. Que l’écart se creuse plus vite. Et que désormais, seules nos intentions réelles décideront de notre sort.

Alors je vous invite à vous poser cette question : dans un monde du travail où on ne peut plus prétendre, combien de temps pensez-vous pouvoir jouer la comédie ?